Book
French
ID: <
10670/1.587v4h>
Abstract
La prison pénale rencontre la question du suicide carcéral dans la seconde moitié du xixe siècle. Il en résulte, à partir des années 1860, la mise en place d’une politique de prévention rigoureuse, dont les résultats paraissent achopper sur l’accroissement continu du nombre des suicides tout autant que la radicalisation des modes opératoires. S’appuyant sur une série de rapports administratifs consécutifs à des suicides et sur la production légale et réglementaire, cet article veut montrer que la manière dont l’institution pénitentiaire appréhende les gestes suicidaires éclaire en retour la nature de l’enfermement dans le cadre de la prison républicaine : si certaines analyses sensibles attribuent ces suicides au désespoir des détenus, pour l’administration pénitentiaire, ils s’assimilent exclusivement à des formes d’insoumission ou d’ultime évasion et justifient donc le renforcement du joug disciplinaire. Il en découle une politique de prévention qui privilégie le contrôle et la surveillance de « ceux dont on craint le suicide ». Jusqu’à mobiliser les formes extrêmes de coercition que sont la cellule de sûreté et la camisole de force, au prix, finalement, d’un fort accroissement du nombre des suicidés.