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« Identité sans liberté ? L’écrivain au temps de la dictature chez Helon Habila »

Abstract

« Prison chains not so much your hands and feet as it does your voice. (…) I write of my state (...) aiming thereby to reduce the weight of these walls on my shoulders, to rediscover my nullified self. » (Habila, Helon. Waiting for an Angel: London, Penguin, 2004, 3) : Lomba, le protagoniste du roman Waiting for an Angel de Helon Habila, est la voix de l'écrivain incarcéré dans le Nigeria des années 1990. Traversant les régimes militaires de 1985 à 1998, le roman suit le parcours des journalistes, éditeurs, rédacteurs et écrivains dont la liberté d'expression est menacée.Face à l'instabilité sociale et à la diabolisation des intellectuels, qu'est-ce que l'identité de l'écrivain privé de liberté ? Comment et dans quelle direction la figure de l'écrivain évolue-t-elle dans un climat politique hostile ?D'abord, la dictature militaire voit dans l'écrivain un ennemi qu'il faut soit annihiler, soit instrumentaliser. Lomba subit l'Histoire qui acquiert donc une image négative à travers les discours des personnages. « You can't write with chains on your hands » (op.cit., 194), la réplique de James, l'éditeur du journal où il travaille, souligne l'incompatibilité entre l'écriture et le diktat politique. L'enjeu de la narration devient alors de défendre le statut de l'artiste en danger de perdre son identité. Si la dictature essaie d'instrumentaliser l'écrivain, ce dernier a, quant à lui, la possibilité d'instrumentaliser le langage pour créer un monde parallèle à la captivité et qui crée une nouvelle identité vacillante reflétée dans la fragmentation temporelle du roman. Dans le chapitre 1 “Lomba”, l'intervention d'un narrateur extérieur indiquent le besoin d'expliquer les dernières pages de son journal pour donner un sens à sa vie. Dans l'ensemble du roman, les histoires racontées par les personnages montrent la nécessité de réinterpréter le réel ou même de le remplacer par un monde fictionnel parallèle. La même tension existe entre récit fictionnel et article journalistique, entre le roman que Lomba écrit et l'article qu'il doit écrire. Ce décalage entre fiction et contexte politique extérieur revisite ici le classique Ars longa, vita brevis : “What matters right now is life.” (op. cit., 114)Enfin, si l'écrivain est un être condamné, l'emprisonnement signifie l'enfermement en et avec soi, être livré à soi-même comme à un autre inconnu et dangereux. Le roman est donc le processus de reconstruction, réparation et recréation du soi anéanti : l'isolement, la perte de soi à travers la colère, l'acceptation et finalement l'oubli. Néanmoins, écrire des poèmes d'amour entre le gardien Muftau et Janice lui donne l'occasion de devenir un intermédiaire (go-between) et non un simple prisonnier ; ce changement de « peau » est pour lui une forme d'expression et de liberté. Cependant, lorsque le pays entier est comparé à une prison, celle-ci n'est plus seulement un espace privé, mais un espace ouvert qui étouffe l'esprit. Il y a, en effet, une tension entre intimité et extériorité, entre histoire personnelle et Histoire. Ainsi, la solution pour l'écrivain est de se créer un alter ego, à l'image du prisonnier Lomba obligé de s'adapter pour préserver sa dignité. Pour conclure, l'instrumentalisation de l'écrivain n'aboutit pas dans le roman, puisque c'est l'écrivain qui parvient à récupérer et à recréer sa propre identité malgré les privations. L'identité est donc construite comme processus et non comme résultat, et la création artistique est vue comme la “deuxième peau” de l'écrivain, un monde alternatif à la prison de la réalité.

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