Hans Joachim Schädlich fait partie du groupe d'artistes qui ont signé la pétition de soutien au chansonnier Wolf Biermann, déchu de sa nationalité par les autorités est-allemandes en novembre 1976, et se sont résolus à quitter définitivement la RDA peu après. De par son parcours d'émigré, il occupe au moment de la chute du mur de Berlin une position à l'intersection des champs littéraires est- et ouest-allemands que l'on peut considérer comme le reflet des soubresauts qu'ont connus à plus grande échelle l'Allemagne divisée puis réunifiée et, en son sein, les habitants des deux États. Soumettre son œuvre en prose à une réflexion en termes de rupture(s) et de continuité(s) paraît donc d'emblée prometteur. Considérer le cas d'un auteur est-allemand émigré offre, qui plus est, l'intérêt de modifier quelque peu la perspective habituellement adoptée lorsque l'on traite de la République démocratique et de ses auteurs. En effet, ruptures et continuités ne se déclinent pas tout à fait de la même manière selon que l'on est un "Gebliebener" ou un "Übergesiedelter". Autre fait déterminant : la présence des émigrés en RFA ne fait pas pour autant d'eux des écrivains de l'Ouest. Bien que certains y débutent leur carrière officielle, leurs prises de position publiques et artistiques demeurent à la périphérie de l'espace public et littéraire ouest-allemand malgré le temps qui passe. Or cet "entre-deux" inconfortable et le discours qui en découle deviennent particulièrement perceptibles au moment du "tournant", lorsque Hans Joachim Schädlich affiche sa satisfaction de voir la RDA et l'idéologie communiste dont elle se réclame disparaître. Il ouvre alors la voie à la "seconde dissidence" de certains artistes de l'Est qui exigeront bientôt de l'ensemble de leurs collègues qu'ils s'affranchissent dans leurs déclarations et leurs pratiques littéraires de toute complaisance envers le régime déchu.

Hans Joachim Schädlich : de la parole empêchée à l'écriture de la ‹ seconde dissidence ›. Évolutions et permanences d'une œuvre située à la croisée des champs littéraires

Hans Joachim Schädlich: from the speech prevented from writing the second dissidence. Developments and permanence of a work at the crossroads of literary fields

Abstract