Abstract
National audience La question de l'économie tsigane intrigue. Les préjugés ne manquent guère et stigmatisent autant l'attitude "indolente" des Tsiganes face au travail que l'origine obscure de leurs ressources, une richesse mal acquise ou la misère. Le sédentaire s'interroge sur les conditions d'existence du nomade: "Depuis le pardon du Christ, le Tsigane ne travaille pas ; il fait des clous et des fers pour les chevaux mais cela n'est pas du travail sérieux" (conclusion d'une histoire racontée en Hongrie). Le paysan pour qui il n'y a d'autre activité sérieuse qu'agricole doute, quant à lui, de la qualité d'un travail lié aux opérations commerciales : "Le Tsigane n'a pas l'habitude du labourage", ou encore "Il s'y connaît comme le Tsigane en labourage". Pour conclure: "Il a peur du travail comme le Tsigane". En revanche, les activités commerciales des Tsiganes sont souvent stigmatisées : "Rare comme le Tsigane sans le troc", ou encore "Marchander comme un Tsigane". Dans un ouvrage sur la langue romani paru en 1930, Popp Serboianu place les Tsiganes comme les Juifs au ban de la société roumaine: "un peuple qui mendie pour vivre, un autre qui amasse pour dominer" ; "quelques nomades ayant comme tout idéal le vol et la rapine et pour toute patrie une feuille au souffle du vent". Prises parmi bien d'autres, ces diverses représentations ne poussent guère à une approche nuancée des rouages de l'économie tsigane.