Article
French
ID: <
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Abstract
Dans les histoires de possession démoniaque, qui abondent dans le premier XVIIe siècle français, la parole est généralement laissée aux exorcistes et aux historiens, spectateurs et herméneutes avisés des tourments des énergumènes, qui restent les objets féminins passifs et muets de leur discours. En rédigeant, autour de 1644, sa version de la célèbre affaire de Loudun dans son Autobiographie, l’ursuline Jeanne des Anges, principale victime des diables, semble se plier à ce code d’obéissance qui l’autorise, en tant que femme, religieuse et possédée, à prendre la plume. Mais si elle use de ce genre topique de l’histoire démoniaque, c’est, paradoxalement, pour reconquérir sa voix personnelle et affirmer, face aux autorités ecclésiales ou historiennes, la légitimité d’une expérience spirituelle féminine et singulière, qui l’affranchit de la vie conventuelle ordinaire et la dote d’une aura mystique sanctificatrice.